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La saga de l’essaimage des abeilles : épisode 2 – choisir le bon nid

 

Nous avons laissé l’essaim provisoirement accroché sous une branche d’arbre (épisode 1). Quelles sont maintenant les stratégies pour choisir le meilleur nid ?
Quatrième étape : la recherche de solutions

Le futur nid obéit à des critères précis : une taille de cavité suffisante, un emplacement en hauteur et une taille de l’entrée permettant d’éviter les prédateurs, une orientation au sud et une entrée vers le bas du nid pour une bonne thermorégulation.

Les éclaireuses sont chargées de cette recherche, dans un rayon de 5 km à la ronde. Lorsqu’une éclaireuse repère un site, elle passe environ une minute à observer l’extérieur, vérifier l’entrée, inspecter l’intérieur, et littéralement par ses déplacements, à en mesurer toutes ses dimensions.
Si ce site lui parait potentiellement intéressant, elle revient à l’essaim et annonce sa trouvaille aux autres éclaireuses par une danse frétillante, signalant les caractéristiques et l’emplacement du site. Elle fera de 10 à 30 voyages entre l’essaim et le site et à chaque retour, effectuera sa danse.

Or, les observations montrent que plus le site est prometteur, plus les voyages sont nombreux vers ce site, et plus la danse est vigoureuse, avec plus de mouvements zigzagants de danse et une durée plus longue.

Cinquième étape : le choix par démocratie directe

Quand elle danse vigoureusement pour un site, une éclaireuse attire et recrute de nouvelles éclaireuses ; celles-ci à leur tour vont visiter le site et celui-ci étant très qualitatif, elles vont au retour danser également vigoureusement et attirer de nouvelles éclaireuses pour de nouvelles visites de ce site.
Chaque abeille a la capacité d’évaluer un site dans l’absolu, sans avoir besoin de le comparer à d’autres.
Le site qui a le plus de danses vigoureuses va au fur et à mesure gagner de plus en plus d’abeilles en sa faveur.

Deux phénomènes vont contribuer à finaliser le débat et à « converger » :

– Des abeilles qui auraient trouvé un site moins bon, ne vont pas s’accrocher à leur choix indéfiniment, ce qui pourrait prolonger indéfiniment le débat (phénomène que les humains connaissent bien !) ;
en effet, après un certain nombre de voyages, chaque abeille se met tout naturellement en mode « retrait repos » et s’arrête de danser, quelque soit le site promu.

– Le choix final semble se faire plutôt par quorum (c’est à dire un nombre suffisant et représentatif) car il serait très long d’attendre un accord complet : plus l’envol est retardé, plus les abeilles dépensent d’énergie, et risquent de ne plus avoir assez de réserves d’énergie pour leur déménagement.
Les dernières études montrent qu’un quorum de 25 à 30 abeilles promouvant un bon site, permettrait un soutien actif de 75 autres éclaireuses ce qui serait suffisant pour l’emporter.

Sixième étape : la stimulation pour l’envol définitif

Les éclaireuses donnent le signal, lorsque la météo est favorable.
Dès le quorum est atteint, elles produisent un son – une stridulation – signifiant la fin du débat. Toutes les éclaireuses font alors un « buzz run », sorte de course effrénée sur le dos de leurs voisines, stimulant ainsi leur température corporelle ; quand le cœur de l’essaim a atteint 35°, les éclaireuses s’envolent.

Septième étape : le pilotage du vol

Les éclaireuses pilotent l’essaim en prenant la direction du site. De fait, pour éviter des collisions, les autres abeilles prennent naturellement la bonne direction. Les éclaireuses volent très vite et au-dessus, pour être bien visible, en se profilant sur la clarté du ciel.  A proximité du nid, l’essaim freine au fur et à mesure et s’installe.

Quelles sont les conclusions de Thomas D. Seeley sur les facteurs clés de succès qui pourraient nous inspirer ?


– il y a une intention commune de la communauté : avoir un bon site ;
– il y a une diversité des solutions recherchées ; en langage de la créativité il s’agit de « diverger ;
– la qualité du débat permet l’optimisation ;
– le choix se fait par une démocratie directe ; le leader, en l’occurrence la reine, n’influence pas la réflexion du groupe, qui est faite par les abeilles « citoyennes » ;
– l’utilisation du quorum permet une convergence plus rapide et précise.

A vous ! Que vous inspire cette saga pour vos propres processus ?



 

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